[RP] Crimes... et enlèvement (retranscription gargote)

[Lyon – Dans une auberge fréquentée - Au printemps dernier]

L’avance que leur avait versé celle qui les avait engagés leur avait permis de se loger dans une auberge tout à fait respectable de la capitale, qui s’accordait bien mieux avec leur couverture de marchands poitevins que les cambuses qu’ils fréquentaient d’ordinaire.

Les deux hommes discutaient avec un négociant lyonnais qui se plaignait de l'effondrement du prix du grain. Le plus grand des deux était un homme entre deux âges qui se faisait appeler Martel. Ses longs cheveux gris presque blancs soigneusement peignés tombaient sur de larges épaules qui trahissaient une constitution athlétique. Son partenaire, qui répondait au nom de Krager, était plus petit et un peu rondouillard mais pas moins robuste ; ses cheveux bruns et courts étaient en bataille ce qui avait l’avantage de cacher leur raréfaction à l’arrière de son crâne. Sa proéminence nasale conférait à son visage une bonhomie et une jovialité qui contrastaient avec la sévérité et l’expression pince-sans-rire de celui de son partenaire.

Martel scrutait discrètement la salle, laissant ses yeux et ses oreilles à l’affût de la moindre information, de la moindre opportunité… du moindre danger aussi. Contrairement à son acolyte qui n’écoutait le marchand lyonnais que d’une oreille très distraite, Krager, les bras fermement croisés sur la poitrine, acquiesçait à chaque diatribe de l’autochtone à l’encontre du pouvoir en place.

Z’avez bien raison, l’ami. Sont tous pareils ces soi-disant grands hommes… Y disent agir pour not’ bien, mais on voit le résultat ! Y sont beaux à festoyer dans leur palais… Allez, je t’offre une dernière chopine : c’est toujours ça qu’ils auront pas !

Après que le bruit sec des chopes vides eut retenti sur la table, le lyonnais se leva et remercia chaleureusement Krager et son oreille compatissante avant de s’en retourner d’où il venait, laissant les deux comparses seuls.

Drôle de pays, hein… murmura Martel d’un ton dédaigneux et moqueur.

Comme tu dis… leur logique me dépasse… M’enfin, on va pas s’plaindre, notre séjour ici nous coûte moins cher que prévu. C’est pas qu’on avait pas les moyens, tu me diras, la rouquine a été généreuse…mais si on peut en dépenser moins maintenant, c’est mieux, il nous en restera plus pour nos vieux jours.

Les deux hommes partirent dans un grand éclat de rire. Martel sortit une petite dague ainsi qu’un morceau de bois qu’il reprit à sculpter tandis que Krager s’occupait de commander à la tenancière charcuterie, fromage et pichet de vin, non sans gratifier la croupe de la donzelle d’une lourde tape amicale.

Krager avait un peu trop bu, comme à l’accoutumée et racontait des histoires que son partenaire avait déjà entendu cent fois mais l’homme aux cheveux d’argent souriait en coin en écoutant les divagations avinées de Krager. Ce dernier fronça soudain les sourcils, son visage laissant croire qu’il réfléchissait à une question de la plus haute importance, question qui ne se fit point attendre.

Il était bizarre son accent, non ? lança-t-il d’un air songeur.

Plait-il ? demanda son interlocuteur incrédule.

Bah, la rousse. L’aristo qui nous a engagé, quoi… Ah… ses belles boucles rousses qui dépassait de son capuchon. Je suis sûre qu’elle était belle, la bougresse. Dommage qu’on ait pas vu son visage. En tout cas, une chose est sûre, l’était pas vraiment d’ici et sûrement pas de notre belle Bretagne… répondit Krager en haussant les épaules.

Veux-tu bien fermer la caverne puante qui te sert de bouche avant que je ne t’en arrache la langue ? souffla Martel dans un murmure courroucé, son poing resserré sur son couteau bien en évidence. As-tu oublié comment sont traités nos compatriotes ici ?

Les deux hommes s’échangèrent un regard noir. Puis celui aux cheveux gris brisa le silence pesant avant que celui-ci n’attire l’attention sur leur conversation.

De toutes façons, à quoi cela nous avancerait-il de savoir d'où elle vient… Bon et ce vin et cette nourriture, ça vient oui ?

La jeune tavernière apparut quelques instants plus tard, les bras chargés de victuailles typiquement dauphinoises. Elle bredouilla quelques mots d’excuses en déposant plats et pichets sur la table et s’en fut sans demander son reste, la tête basse.

Les deux hommes mangèrent, l’un lentement et en silence, l’autre se goinfrant bruyamment. Quand il eut fini d’engloutir sa part, Krager se leva en oscillant sous l’effet de l’alcool et détacha sa bourse de cuir de sa ceinture afin d’aller régler la note à l’aubergiste.

C’est moi qui régale !... annonça-t-il joyeusement tandis que Martel en terminait avec une épaisse tranche de pain couverte de Saint-Marcelin. Quand je pense à tout cet argent qu’elle nous a proposé la rouquine. Elle doit être sacrément noble pour être aussi riche. Et tout ça pour l’enlever la vicomtesse là, même pas pour la tuer ! M’font marrer ces nobles à…

BLANG !

Les poings de Martel frappèrent si violemment la table lorsqu’il se leva à son tour que les deux choppes qui y étaient posées vacillèrent un peu.

Je crois que tu as assez bu pour ce soir, l’ami, dit-il à Krager d’une voix glaciale. Il est temps d’aller prendre du repos, ne crois-tu pas ? demanda-t-il en écartant légèrement sa veste afin de découvrir à la vue de son partenaire ivre la poignée de sa dague. Je règle la note, veux-tu ? Attends-moi là… Et tandis qu’il passait à côté de Krager, il lui souffla à l’oreille : encore un mot et je te tue de mes propres mains, sac à vin.

L’homme aux cheveux d’argent fut prompt à donner au tavernier ce qu’ils lui devaient et tout aussi prompt à emmener l’ivrogne bavard qui lui servait de partenaire.

Le lendemain, ils quittèrent l’auberge un peu avant l’aube, tandis que la capitale était encore endormie dans ce qui restait de la salvatrice fraîcheur de la nuit. Ils se séparèrent, partant chacun de leur côté, s’assurant discrètement que personne ne les suivait et se retrouvèrent aux écuries.

J’ai de bonnes nouvelles, annonça Krager lorsqu’il retrouva son acolyte. Il baissa alors la voix de manière à ce que seul Martel puisse l’entendre. Je me suis immiscé dans une conversation. Son cocher dit qu’ils ne feront qu’une petite halte à Maubec, le temps de saluer sa progéniture j’imagine. Ils repartent dès le lendemain pour Saint-Firmin, sans autre escale que celles qui seront nécessaires au voyage… Ils mettront des jours à comprendre…

Le visage de Martel s’éclaira d’un petit rictus légèrement sadique.

Parfait, parfait ! Tu es de bien meilleur augure une fois que tu as cuvé, tu sais ? s’exclama-t-il en donnant une grande tape amicale dans le dos de Krager. En route l’ami, nous avons encore du pain sur la planche pour effectuer notre « livraison ».

Les deux hommes éclatèrent de rire. Ils grimpèrent sur leurs puissantes montures en sifflant joyeusement puis, sans perdre un instant et sans être suivi par quiconque, ils quittèrent la cité lyonnaise. L’on ne les y revit plus jamais.

[Trois jours plus tard, sur la route entre Maubec et Valence]

Freyelda avait décidé de partir en ses nouvelles terres de Saint Firmin, nichées au creux de la montagne. Elle n’avait pas encore eu l’occasion de s’y rendre même si elle mettait un point d’honneur à se tenir régulièrement informée de ce qu’il s’y passait et de l’avancée des travaux et des préparatifs qui précédaient son arrivée. Elle avait l’intention d’y séjourner assez longuement, une forme de retraite comme une autre. Cela faisait des semaines qu’elle se terrait à Maubec et que l’on ne l’avait pas vue ni à Vienne ni à Lyon. N’ayant plus d’obligations dans l’une et dans l’autre de ces cités, elle ne s’y rendait que par extrême nécessité.
Enguerrand poursuivait sa formation chevaleresque : il était à présent le plus beau et le plus valeureux des écuyers du monde. Aliénor, elle, passait son temps entre Vienne, Maubec et le couvent, où elle recevait –du moins sa mère en était-elle convaincue- toute l’éducation qu’une jeune fille de son rang se devait d’avoir. Les enfants grandissaient…

A cette douce lassitude, ce sentiment léger d’inutilité, s’ajoutait la terrible mélancolie qu’avait provoquée la disparition brutale d’Alyanne de Saint-Clément-sur-Durance, sa vassale mais surtout son amie et par-dessus tout, la fiancée de celui qu’elle considérait comme son frère. Elle connaissait la douleur que Walan éprouvait, pour avoir subi pareil malheur elle-même. Et que son ami puisse vivre le même drame une seconde fois l’accablait de tristesse. Peut-être était-ce de la lâcheté mais elle n’arrivait pas à faire face à la détresse seigneur de Meyrieu qui la renvoyait à sa propre incapacité à lui apporter le moindre réconfort alors que lui avait tant fait pour elle.

Partir au loin… Fuir la chaleur étouffante de l’été avant qu’elle ne s’abatte sur la plaine. Fuir ce monde dans lequel elle ne se sentait pour l’instant plus à sa place… Fuir ce vide… Retrouver l’envie… les joies simples de la vie…et le sourire. Retrouver un peu de fraîcheur, dans tous les sens du terme.
Ce voyage lui ferait le plus grand bien, elle le savait. Mais il était long et un malheur était si vite arrivé… Aussi s’était-elle résolu à se rendre à Lyon pour déposer à l’office héraldique du château Pierre-Scize quelques parchemins, dûment scellés…. Juste au cas où…Elle en avait profité pour informer ceux que cela pouvait intéresser qu’elle se retirait quelques temps à Saint-Firmin, au moins pour passer l’été… au frey.

Le temps d’un petit détour par Maubec, pour embrasser ceux de ces enfants qui s’y trouveraient et tout fût fin prêt, cocher et laquais l’attendaient dans la cour du Château des Roches. Avant de s’engouffrer à l’intérieur de la voiture, elle souffla au cocher, sans plus d’explication :

Nous ferons un détour et une courte halte à Jaillans.

Comme Madame le souhaitera…, répondit l’homme en s’inclinant, un sourire convenu et un peu complice au coin des lèvres.

Charles et elle s’étaient promis de s’accorder un peu de temps pour eux. Cela faisait bien trop longtemps qu’ils ne s’étaient pas vus. Cela tombait bien, il y avait entre eux une histoire de baptême qui traînait depuis bien trop longtemps au goût de la pieuse Francesca-Amalya. Mais surtout la présence et la compagnie de son cher, très cher ami lui avaient terriblement manquées. Charles…

L’attelage avait quitté Maubec depuis plusieurs heures maintenant et la fragile dame d’Avencourt était plongée dans ses pensées, tournées vers ces retrouvailles qui approchaient à grands pas, lorsque tout bascula…Elle fut violemment projetée sur le sol de la voiture : les chevaux s’étaient arrêtés aussi nets que possibles dans un fracas de bois et de métal qui recouvrait à moitié les vociférations du cocher et du laquais qui parvenaient un peu étouffées aux oreilles de Freyelda.

- Mais ça va pas ? Faut pas rester en plein milieu de la route… Faites place, manants ! Savez-vous au moins qui se trouve dans cet attelage ?

- Oui on sait, va. Bien pour ça qu’on est là, gros malin…

Des bruits de lutte s’en suivirent alors qu’elle s’approchait de la porte ; elle se ravisa donc et se recula le plus qu’elle put lorsque la porte de l’attelage s’ouvrit sur deux visages qui lui étaient complètement inconnus.

Bonsoir Votre Grandeur, dit poliment un homme aux cheveux gris. Permettez-moi de vous tenir compagnie pendant la fin de notre voyage…

L’homme qui l’accompagnait avait l’air moins raffiné et l’impression se confirma sitôt qu’il eût ouvert la bouche après avoir toisé la vicomtesse :

Hmmm… Pas tout à fait mon genre mais on s’en contentera, commenta-t-il, le visage illuminé par la lubricité.

Freyelda tenta tant bien que mal de garder une certaine contenance mais à la simple pensée de ce que pourraient lui faire subir ses deux agresseurs, son cœur s’était mis à cogner si fort dans sa poitrine que cela en était douloureux ; elle sentait la peur la comprimer comme un étau. Le premier des deux brigands, celui qui avait les cheveux presque blancs, stoppa net les élans du gros balourd.

Couché, Krager ! Garde tes idées de débauché dans tes braies à moins que tu ne veuilles que je te transforme en eunuque. Nous nous sommes engagés à la livrer en vie, entière et intacte. Elle ne lui servirait plus à rien si elle était souillée, c’est ce qu’elle a dit. Je suis peut-être un mercenaire, Krager, mais j’ai un certain sens de l’honneur, contrairement à toi. Va plutôt cacher les corps et fais nous partir au plus vite. On n’a pas la journée devant nous, je te rappelle.

Le dénommé Krager baissa les yeux et referma la porte en maugréant dans sa barbe. Le soulagement n’avait été que de courte durée et somme toute bien relatif pour Freyelda. Si elle semblait assurée de garder son honneur, pour l’instant, elle était tout de même en fort mauvaise posture. Elle se rassit, bien droite dans la banquette et leva les yeux vers ceux de l’homme aux cheveux gris. Il n’y avait dans le regard de Francesca-Amalya ni peur, ni colère, juste une politesse froide et convenue. Tenir son rang, quelles que fussent les circonstances, voilà tout ce qu’elle pouvait encore faire. Elle attendit, silencieuse.

Veuillez me pardonner Votre Grandeur, je me montre décidément presque aussi grossier que mon partenaire : je ne me suis pas encore présenté, dit-il dans un sourire écoeurant d’hypocrisie. Je me nomme Martel et ceci est, je pense que vous l’avez deviné, un rapt pur et simple.

Laissez-moi deviner, dit posément la baronne de Saint-Firmin, il n’y a rien de personnel dans tout ceci, vous faites seulement ce pour quoi on vous paie ?

Son interlocuteur la fixa quelques instants puis répondit en riant, un air toujours aussi faux sur le visage. Vous êtes d’une grande sagacité, Madame. Tout à fait à la hauteur de votre réputation.

Et si c’est une pure question d’argent, peut-être pourrions-nous nous arranger entre personnes de bonne compagnie, tenta la captive.

Hélas pour vous, toutes aussi riches que puissent être les terres guillestrines, je crains que vous ne puissiez pas rivaliser avec l’offre que notre commanditaire nous a faite. Je ne vous dis pas combien, c’est indécent... Et comme je l’ai dit tout à l’heure, je suis un mercenaire d’honneur.

La somme qu’il lui souffla à l’oreille lui fit écarquiller les yeux à tel point qu’elle crut qu’ils allaient lui sortir des orbites. Qui pouvait bien lui en vouloir à ce point ? Les revenus de ses terres ne suffisaient pas à payer le quart de leur récompense. Il lui aurait bien fallu au moins deux ou trois duchés pour espérer détourner ses ravisseurs de leur objectif. Aussi, si la négociation avait échouée, il restait l’intimidation. La vicomtesse répugnait à employer ce genre de méthode mais en l’occurrence elle n’avait guère le choix.

Vous savez, votre entreprise est risqué. Je ne suis pas n’importe qui figurez-vous…Nombreuse sera l'armée qui partira à vos trousses Sieur Martel.

[Au printemps dernier, au Domaine de Jaillans, Seigneurie vassale du duché d'Hostun]

La journée était maintenant bien avancée et il n'y avait toujours aucune trace de l'attelage qui devait amener la Dame des lieux à l'horizon. Quelque chose clochait. Le Baron de Rochechinard trépignait et tournait tel un lion en cage, faisant les cent pas dans la cour du castel de Jaillans.

« Mais ce n'est pas possible », fulminait-il. « Vous là ! Oui c'est bien vous que je hèle puisque vous semblez n'avoir pour l'heure aucune occupation ! Êtes-vous bien sûrs de n'avoir eu aucune nouvelle ? N'a-t-elle vraiment pas différé son arrivée ? »

L'inquiétude l'envahissait, tandis qu'il invectivait les hommes de sa vassale dans une vaine entreprise pour retrouver son calme. La Baronne de Saint Firmin tardait à venir et cela n'était point dans ses habitudes, loin de là. Mais avait-elle seulement perdue celle, déraisonnable, de voyager sans escorte ? Il lui avait pourtant fait maintes remontrances à ce sujet.

« N...non votre Grâce, la Vicomtesse devrait déjà être parmi nous. Vous pouvez en être certain. Je... »

N'y tenant plus, le Chevalier sortit en trombe dans la cour et prit la direction des écuries. Il trouva le premier écuyer et lui ordonna sèchement de préparer sa monture ainsi que celles de ses deux sergents d'armes. Il avait le profond sentiment que quelque chose était arrivé à l'épouse de feu Aymon d'Avencourt.

Il se souvint alors de la promesse qu'il avait faite à son défunt ami. Une fois sur sa monture, il partit au grand galop, laissant derrière lui charges et fonctions ô combien futiles en cet instant pour aller s'enquérir du sort de Francesca-Amalya d'Avencourt.

« Jean Eudes ! Hugues ! Soyez attentifs je vous prie ! » Le chevalier avait attendu ses deux fidèles hommes d'armes afin de leur donner ses directives.

« Je ne saurais l'expliquer, mais un mauvais pressentiment m'envahit. Espérons qu'il sera vite chassé en chemin, ou une fois au castel des Roches. »

Charles de Macquart ressentit alors une vive douleur au niveau des côtes qu'il tenta un instant d'ignorer. Il s'agissait d'un vilain souvenir de guerre dont il avait punis de manière mortelle et fort sanglante l'assaillant. Un vif mouvement de fer au travers de l'air et de la chair, et la tête du félon avait été séparée du reste de son corps, afin qu'icelui paie le prix de sa fourberie. Un mouvement intuitif sous l'impulsion de la rage accompagné d'un cri vengeur.

« Jean Eudes, »poursuivit le Maréchal d'Armes de France. « Si jamais nous venions à faire une rencontre, soutiens moi autant que tu le peux sur le flanc droit, je ne suis point encore remis de mes blessures du front Artésien.»

Le duc avait retrouvé son sang froid dans l'action, son calme et sa lucidité. Fixant son regard à l'horizon, il donna un nouveau coup d'éperons à sa monture qui accéléra la cadence.

[Sur la route entre Jaillans et Maubec, à la fin du Printemps]

Flanqué de ses deux hommes d’armes, le Duc d’Hostun filait au triple galop sur la route sur laquelle l’attelage de sa vassale devait se trouver. Son inquiétude ne cessait de croître à mesure qu’il progressait sur les chemins. Il était maintenant convaincu qu’il était arrivé quelque chose à la Vicomtesse de Guillestre et il fallait maintenant découvrir ce dont il s'agissait.

Charles de Macquart remontait la route, à la recherche d’indices pouvant indiquer que la voiture de la Dame de Jaillans était passée par là. Bientôt son regard fut attiré par des traces de ce qu'il semblait véritablement être des roues qui bifurquaient de la route principale pour s’engager sur un petit chemin de terre, peu praticable. Le Chevalier fronça les sourcils et il s’arrêta quelques instants pour examiner les lieux avec moult attention..

« Monseigneur ! Monseigneur ! Hâtez-vous ! Hugues a trouvé quelque chose. »

Le Maréchal d'Armes de France releva la tête et aperçut Jean-Eudes qui hurlait en lui faisant de grands signes, non loin de là. Il enfonça ses éperons dans les flancs de sa monture pour couvrir la courte distance qui le séparait de ses deux hommes d’armes. Lorsqu’il arriva à leur hauteur, il découvrit des traces profondes et significatives dans la terre encore un peu molle de la route. Un attelage s’était manifestement arrêté en toute urgence. Les empreintes des chevaux étaient erratiques, rendant l'analyse difficile.

« Par la malpeste ! » lâcha-t-il . Puis se tournant vers les deux hommes qui l’accompagnaient : « Fouillez les environs pour voir si vous découvrez d’autres indices » , lança-t-il aux deux hommes qui l’escortaient.

L’ancien Lieutenant de Montélimar et de Lyon mit le pied à terre et examina au plus près la multitude d’empreintes qui se trouvaient à ses pieds. La scène avait pour lui une désagréable sensation de déjà-vu, tout ceci ne lui rappelait que trop l’enlèvement de son fils, François, par des criminels et hérétiques se faisant appeler In Tenebris.

Il avait eu mainte fois à faire à cette horde lorsqu'il portait les armes de Templier. Il était devenu l'un de leur ennemi suite au grand incendie de Vienne. Les In Tenebris avaient réduit la cathédrale en cendres. Poursuivis par le Prévôt des Maréchaux menant les poursuites, un grand nombre avaient passé l'arme à gauche et peu étaient parvenus à fuir. Charles de Macquart avait fait un prisonnier. Longuement interrogé, ce dernier avait fini par être mis à mort à Paris, devant le peuple et la noblesse française lors d'une exécution dirigée par le Seigneur d'Artas et conclue par le Bourrel du Lyonnais-Dauphiné, Volverine.

La rancœur des hérétiques à son encontre se fit telle qu'ils défièrent la garde ducale peu de temps après pour mettre les mains sur le jeune fils du gouverneur du Lyonnais-Dauphiné alors à Briançon.

De cette triste aventure, Charles avait néanmoins retiré une grande expérience en matière de filature et de traque. Ainsi, il en vint à conclure qu’un groupe composé de deux ou trois cavaliers avait contraint une voiture seule à s’arrêter. Restait à savoir s’il s’agissait de celle de la dame de Jaillans et découvrir la raison de cet abordage.

« Vôtre Grâce ! Ici ! Ici ! »

Jean-Eudes et Hugues se trouvaient dans les fourrés qui bordaient la route, à la lisière de la forêt et semblaient tirer quelque chose de lourd. Il les rejoignit en quelques grandes enjambées mais ce qu’il vit le stoppa net. La prise de ses deux compagnons n’était autre qu’un cadavre.

« Mais c’est… c’est »

« Hélas, Jean-Eudes, je crains qu’il ne s’agisse d’un des laquais de la Vicomtesse de Guillestre… », aquiesça gravement le Seigneur d’Artas à la place de son sergent d'armes bouleversé.

« Poursuivez les recherches ! Le corps du cocher ne doit pas se trouver bien loin. Et inutile de chercher les membres de son escorte, elle n’en avait pas » , ajouta-t-il d’un air sombre.

Tandis que ses hommes reprenaient à fouiller les fourrés, le Duc d’Hostun examina le corps du malheureux laquais. Celui-ci tenait dans sa main serrée un morceau d’étoffe que le chevalier eut le plus grand mal à retirer, le temps et la rigidité cadavérique ayant fait leur œuvre. C’était un morceau de gilet dans la poche duquel il trouva une petite sculpture de bois. Charles l’observa, intrigué mais fut tiré de ses pensés par l’appel d’Hugues : l’infortuné cocher venait d’être retrouvé.

« Nous ne pouvons plus rien faire pour eux », annonça gravement le Baron de Rochechinard. « Rentrons prestement à Jaillans. La Vicomtesse de Guillestre a été victime d'un enlèvement, tenez cette constatation pour certaine. Il nous faut partir au plus tôt à sa recherche si nous voulons garder une chance de la retrouver. »

Acquiesçant du chef, les deux fidèles de l'ancien Chancelier du Lyonnais-Dauphiné vinrent reprendre leur place à ses côtés. Tous deux ne dirent mot en observant leur seigneur se tenir les côtes sans plus chercher à dissimuler sa douleur. Ils leur faudrait être plus vigilant qu'à l'accoutumée. La maison de Macquart se prépara avec célérité. Des hommes de confiance furent envoyés au quatre coins du Duché afin de collecter la moindre information. Ordre fut donné de prévenir François mais également Aliénor et Enguerrand, les enfants de la malheureuse Vicomtesse. Enfin, il fut décidé que Jean-Eudes et Hugues accompagneraient le Duc d’Hostun dans sa quête.

Dans l’heure qui suivit, une nouvelle traque était lancée, les menant bien au delà du col de Vars.

[Des semaines plus tard - Guillestre]

Aliénor était accoudée devant le vitrail qui ornait la fenêtre de sa chambre, assise sur le petit banc de pierre sculpté à même le mur. Elle soupira vivement et réfléchit quelques instants. Il lui fallait trouver quelque chose à faire pour tromper l'ennui. Et accessoirement pour échapper à l'intendant de Guillestre et à ses soporifiques discours sur ce qu'il convenait de faire pour bien gérer le domaine familial.

Devenue femme depuis peu, à peine sortie de l'enfance, la jeune fille ne s'intéressait absolument pas aux considérations pécuniaires qui semblaient pourtant obséder l'ennuyeux homme de chiffres. Aujourd'hui, elle ne se sentait pas d'humeur à lui claquer la porte au nez : elle devait donc s'occuper de telle manière que nul ne pourrait la déranger...

Aller parader dans Guillestre, montrer ses belles toilettes et ses formes de plus en plus avantageuses ? Hmmm... trop simple... et déjà fait il n'y avait pas si longtemps que cela. Faire des remontrances à n'importe quel domestique qui croiserait son chemin ? C'était plaisant... mais cela l'exposait dangereusement au perfide intendant... Et puis rester dans ce château de malheur... très peu pour elle. Elle avait besoin de prendre l'air, elle avait besoin d'action, pour oublier...

- Margaux...
Margaux?...
MÂÂÂÂRGAAAAUUUUX !

- Oui, mademoiselle ? fit une voix essoufflée.

-Ah ! mais où étais-tu à la fin ?... demanda-t-elle d'un ton inquisiteur. Oh et puis peu m'importe, coupa-t-elle alors que la pauvre suivante aux traits tirés avait ouvert la bouche pour répondre. Fais mander le fauconnier et préviens les palfreniers. Nous partons à la chasse.


-Mais enfin mademoiselle, protesta la domestique, ce n'est pas...

- Il suffit Margaux ! s'exclama Aliénor en tapant impérieusement du pied. Je VAIS à la chasse.

C'était sa mère qui lui avait enseigné le noble art de la chasse à l'épervier et la jeune fille avait une véritable passion pour cet exercice. Sa mère... Sur sa monture, Aliénor était songeuse. Elle était sortie du château pour laisser ses mornes pensées derrière elle mais c'était visiblement peine perdue ; mais au moins, elle ne ferait pas les cents pas dans sa chambre.

La disparition de sa mère l'avait plongée dans une tristesse infinie. Au printemps, elle avait reçu une lettre de Carnil, un des plus proches amis de ses parents qui lui expliquait que sa vicomtale mère avait sans doute été enlevée et qu'il se lançait à sa recherche. La nouvelle fut dure à digérer. A vrai dire, la nouvelle n'était toujours pas digérée.

"Vous êtes trop jeune." "Ce n'est ni aux jeunes filles ni aux enfants de partir à l'aventure." "C'est trop dangereux." "Que dirait votre mère si vous faisiez une pareille sottise ?" "Qui s'occupera de gérer les terres de votre mère ? (ah, ce maudit intendant ! Sa rétribution serait bientôt revue à la baisse) Voilà les arguments qu'on lui opposait quand Aliénor parlait de se lancer elle aussi sur les traces de sa mère. Arguments qu'elle trouvait parfaitement fallacieux. Aliénor était une personne de parfaite mauvaise foi.

Finalement, la jeune fille était condamnée à rester en Dauphiné à attendre les rares nouvelles macquariennes qui lui parvenaient tantôt de Charles tantôt de François. Pour l'heure, tout ce qu'elle savait, c'est que la quête du duc d'Hostun l'avait lancé sur les traces de deux mercenaires appelés Marter et Kragel (à moins que ce ne fût Martel et Krager) et conduit au delà des montagnes, jusqu'en Italie. Les enquêtes qu'elle avait fait mener en Dauphiné lui avaient rapporté quelques informations supplémentaires car une conversation entre les deux malfrats avaient été surprise par plusieurs personnes dans une taverne lyonnaise. Ainsi, les deux faux marchands, mi bretons mi poitevins mais totalement mauvais, avaient été engagés par une riche (et sûrement grasse) noblionne quelconque à l'accent bizarre. Rousse. Bien évidemment.

Max, DeDe* et le Kaltpiten l'avaient toujours dit : l'engeance rousse est maléfique. Le drame qui frappait la maison d'Avencourt n'en était qu'une preuve supplémentaire. D'ailleurs, ces deux là ne payaient rien pour attendre. Max, non content d'avoir refuser de l'épouser, avait trouvé le moyen de se faire enlever lui aussi mais dans d'autres circonstances (le Très-Haut manquait cruellement d'originalité tout de même). Le Kaltpiten était trop occupé à courir les nonnes, les ribaudes parvenues et les chapelles pour les épouser et faire baptiser les bâtards qu'elles lui faisaient passer pour les siens. Aucun des membres de cette étrange confrérie que tous rois formaient avec Freyelda n'était parti à sa recherche. Cela dit, ils étaient loin d'être les seuls des "amis" de sa mère à se désintéresser de l"affaire". Les vassaux guillestrins se faisaient au choix ou assassiner ou estropier. Bref, personne, mis à part quelques guillestrins soucieux du sort de leur maîtresse bienveillante, personne donc n'était parti sur les traces de Carnil et Freyelda et Aliénor bouillonnait en maudissant la terre entière. Le seul à qui elle n'arrivait pas à en vouloir était son parrain avec qui le Très-Haut n'était pas des plus cléments non plus. Walan ainsi qu'Aliénor savaient que la baronne de Saint-Firmin aurait trouvé le moyen d'échapper à ses ravisseurs rien que pour aller tirer les oreilles du seigneur de Meyrieu si celui-ci s'avisait d'abandonner ses charges et ses responsabilités envers le Duché.

Il y eut un cri dans le ciel. Asclépios, l'épervier que lui avait offert sa mère pour son anniversaire, revenait avec un lièvre dans les serres. La jeune fille tendit son bras pour y accueillir le rapace à qui elle adressa un sourire fier. Aliénor était lasse aussi tous rentrèrent. Peut-être laisserait-elle la prise du jour aux domestiques pour leur souper.

Un fois de retour au château, elle écrirait à son frère.

[Domaine d’Amilly, quelques semaines plus tard]

Au château, de la fenêtre de sa chambre, la baronne de Marsanne contemplait le ciel étoilé, les jours passés avaient été riches en émotion, et Espoire n’arrivait pas à dormir. Il faisait beau cette nuit, et elle aimait rester là à regarder les astres, une vraie harmonie des yeux…
La nuit été bien avancée quand ses pensées se tournèrent vers la seule personne a qui elle aurait voulu parler de tout cela, puis son sourire d'effaça quand elle se rappela du moment où on lui annonça la nouvelle:

Baronne, j’ai une triste nouvelle à vous annoncer, lui avait dit un page alors qu’elle s’était rendu à Amilly pour se reposer

Une triste nouvelle? Si je suis venue ici c’est justement pour ne plus en avoir…

il ouvrit la bouche pour parler mais se ravisa

Bon puisque nous y sommes, quelle est cette horrible nouvelle que je dois absolument connaitre maintenant?

Baronne…La vicomtesse de Guillestre a été kidnappée…

Espoire en était restée horrifiée, avait même eu du mal à y croire au début, mais les jours passaient et cela ne faisait que se confirmer.

Elle avait payé quelques gens pour enquêter sur ce drame, mais de tout ce qu’on lui avait rapporté, il n’y avait presque rien qui pouvait l’aider à savoir ou son amie se trouvait.
Deux hommes l’avait kidnappé, probablement plus, mais il n’y avait que ces deux là qu’on avait pu voir et entendre parler dans une des tavernes de Lyon, ils auraient été engagés par une noble rousse, malheureusement la seule rousse qu’Espoire connaissait c’était Morgwen de la Louveterie, est-ce elle? Mais si c’est le cas, pourquoi? elle en connaissait bien une autre mais elle était morte…
On lui avait parlé d’une rousse Berrichonne mais, la Baronne avait du mal à trouver un lien avec toute cette histoire.
Qu’avait-t-il bien pu se passer? Et le duc d’hostun, qui était parti à sa recherche, et dont on n’avait plus aucune nouvelle…

Ses pensées revinrent après sur ses enfants, qu’elle n’avait pu aller voir depuis qu’elle avait appris la nouvelle, la culpabilité remplaça alors se sentiment d’inquiétude et de tristesse, et Aliénor qui était encore à un âge ou il lui faut une présence à ses cotés, même si elle connaissait son fort caractère.
à cet instant elle se leva, et d’un pas lent se dirigea vers son bureau ou quelques bougies brulaient encore, prenant sa plume et un parchemin elle commença : « ma chère Aliénor, … »

Une fois avoir fini, elle scella la missive qu’elle laissa déposée soigneusement sur son bureau, demain matin elle l’enverrait, puis alla s’allonger sur son lit, fixant le baldaquin, et attendant que le sommeil vienne l’emporter, même si l’envie n’y était pas.

[ Au début de l'été, provinces du Piemont et de Liguria, en Italie ]

Chaque jour passé loin de leur bien aimée province les voyait se rapprocher des ravisseurs et de la bienveillante Francesca Amalya d'Avencourt. Accompagné de ces deux dévoués sergents d'armes, le preux Charles de Macquart maintenait ses efforts pour libérer la Vicomtesse. Il était encore plus décidé que lors de sa traque des incendiaires de la cathédrale de Vienne, et tout autant que lorsqu'il avait ramené son propre fils de l'antre des In Tenebris.

La poursuite avait connu des débuts bien difficiles. Le duc, point remis de ses blessures du front artésien, chevauchait avec difficulté malgré toute sa volonté. Ils accumulèrent jusqu'à deux journées de retard, qui ne purent être comblées que lorsque que le chevalier accepta de recevoir des soins à Cuneo. Il y connaissait un ancien chevalier hospitalier qui les accueillit le temps nécessaire à son prompt rétablissement. Il n'obtint cependant pas l'assistance de l'ordre militaro religieux, concentré sur des troubles touchant Roma.

Cependant, le vieux chevalier hospitalier fit un prêt très conséquent à l'ancien chevalier templier, nécessaire à la poursuite de son voyage. Il lui donna également la liste de ses agents de renseignement à travers la région. Cette partie de l'Italie, Charles de Macquart l'avait souvent traversée pour se rendre à Roma lors de diverses cérémonies ou en tant que membre de l'Etat Major des Saintes Armées. Cependant, il n'en avait qu'une connaissance partielle et cette halte, leur avait finalement permis d'accroître leurs chances de retrouver la Vicomtesse.

Au fur et à mesure qu'ils suivaient la trace de la voiture qui leur avait été décrite au château des Roches, ils obtenaient des informations sur ces ravisseurs parfois rendus bavards par l'alcool. Jean Eudes, fils de marchand longtemps installé à Napoli, était entre autre chargé de faire parler à coup de tonneaux de vin et de chope de bière les piliers de tavernes dont le duc d'Hostun ne parvenait à comprendre le dialecte. Ce grand brun aux cheveux bouclés était devenu indispensable au chevalier lors de ce périple, et il n'hésitait point à se reposer entièrement sur lui. Sa vivacité d'esprit et sa connaissance parfaite de la langue leur avaient permis de se sortir de situations délicates, où ils eurent parfois du faire usage de leurs armes pour s'en sortir, ou pas.

Les ravisseurs les avaient menés jusqu'à Genova, et Charles avait fait établir leur camp à l'entrée de la ville, loin du tumulte et de l'activité grouillante des marchands. Ils n'avaient plus qu'une demie journée de retard sur Freyelda, et le moral était donc au beau fixe. Comme à l'accoutumée, les deux sergents d'armes étaient partis faire le tour des tavernes à la recherche de la moindre information. Le duc quant à lui jouait le rôle d'écuyer, revivant son enfance en province flamande.

Le soleil venait à peine de plonger dans la mer méditerranée lorsque ses hommes revinrent, les traits graves et tirés par la fatigue. Regardant alentour et s'assurant qu'ils n'avaient point été suivis, Charles de Macquart les interrogea alors.

- « J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle mon seigneur, par laquelle souhaitez-vous que je débute? » chuchota le fils de marchand.

- « Et bien Jean Eudes, rétorqua prestement l'ancien Gouverneur du Lyonnais-Dauphiné, le temps n'est point à prendre ce genre de décision. Parle vite et bien comme tu sais le faire je te prie. »

Acquiesçant du chef, le grand brun poursuivit alors.

- « La Vicomtesse se porte bien, nous l'avons aperçue tandis que nous marchions à proximité du port. Mais elle était sous bonne garde et nulle intervention n'était envisageable. Nous n'avons pu qu'observer votre grâce. »

« Nous suivions jusqu'alors deux hommes, qui viennent de remettre la Vicomtesse entre les mains de tout un groupe puissamment armé. Je crois également que les commanditaires de l'enlèvement ont de gros moyens, à en juger par leur équipement, ainsi que par l'énorme coffre rempli visiblement de florins et qui a été remis aux deux mercenaires. Ils ont également un magnifique vaisseau dans lequel ils ont embarqué. Me faisant passer pour un pélerin, j'ai interrogé l'un des matelots. Ils prennent la direction de Pisa, en Toscana. Nous aurions visiblement la possibilité d'appareiller demain à l'aube si... »

- « Des florins... » l'interrompit Charles. « De gros moyens...Firenze ! Ils doivent se rendre à Firenze ! Mais diantre ! Qui peut bien en vouloir à Francesca au point de l'arracher à la terre du dauphin de France !

Quoi qu'il en soit, c'est un très bon travail Jean Eudes, mon éternelle reconnaissance t'est acquise et je veillerai à m'en souvenir à notre retour. »

- « M...Merci mon seigneur. Mais, si je puis me permettre, la situation se complique et il ne sera à présent guère aisé de libérer la Grandeur d'Avencourt. »

- « J'en ai bien conscience, mais à présent, nous connaissons la destination et avons refait complètement notre retard. Nous allons les suivre au cas où l'occasion de reprendre Francesca se présenterait, autrement, fais moi confiance pour trouver soutien auprès de vieux amis. Fais ce que dois, advienne que pourra, tels sont respectivement mes cris et devise, et tu connais celle de ma famille. Force et Honneur. Peu importe la puissance de notre ennemi ou bien son nombre, sois en certain, nous parviendrons à rendre leur mère à Alienor et Enguerrand. Le Très Haut m'en est témoin. A présent prépare notre départ pour Pisa, ma plume doit parcourir quelques parchemins avec célérité. »