Entrée de Kalten

Dans le silence de la salle de réception, les lourdes portes de la salle de réception s'ouvrirent sur un Kalten trempé, l'eau gouttant de ses cheveux sur le sol, sa cape trempée et crotée traînant sur le sol... Sans accorder un regard autour de lui, il s'avança franchement en grommellant contre les éléments

Putain de temps de merde... On se croirait chez les ploucs, et c'est pas comme si je n'avais pas eu ma dose... 42 jours à patoger dans la boue à bouffer de la morue séchée, et voila que je me coltine entre de la pluie. C'était bien la peine de faire une trève tient, au moins chez les bouseux on pouvait trucider quelques guignols quand l'envie nous en prenait... Y a pas à dire, Dieu a de l'humour. 'Culé va...

Se souvenant soudainement de quelques bonnes manières qu'on tenta de lui inculquer, Kalten arrêta de grommeller et défit la broche en métal mat qui retenait sa cape pour la mettre à goutter dans l'antichambre, et non sur le tapis à ses pieds... A défaut d'avoir été assailli par un quelconque valet qui l'en aurait débarassé et aurait sut, lui, où la mettre, Kalten avait décidé de l'abandonner là. Au moins il sera sûr de la retrouver lors de son départ.
Revenant sur les lieux du crime, Kalten put alors aborder sans remord le tapis, grommelant de plus belle... Il aurait presque été parfait s'il n'avait pas oublié que ses bottes aussi étaient crottées. Mais il ne fallait pas trop lui en demander à la fois.

...Et évidement quand il pleut, pas moyen de culbuter une petite bergère dans les fourrés...

la litanie se poursuivit encore, à la limite de l'audible, marmoné dans sa barbe, et ponctué de chapelet d'insultes et de jurons.

Gilles se rendait dans ses quartiers quand il entendit une voix étrangère gromeler dans la grande salle de réception. S'approchant il découvrit un homme d'apparence plutôt rustre qui ruisselait d'eau et jurait à tout bout de champ. Hésitant, il finit par céder au devoir et revint dans la pièce avec un linge.

Bonjour Messire. Je me nomme Gilles, je suis le page du Baron de Maubec. Permettez donc que je vous déleste de vos vêtements trempés. Je vous laisse vous sécher avec ce linge, le temps d'allumer un feu dans la cheminée.
Par contre, sans vouloir paraître insolent, veuillez surveiller votre language s'il vous plait. Je n'ose imaginer ce que dirait Madame la Baronne si elle vous entendait.

Elle dirait qu'elle ne serait pas très contente, bien qu'elle ne serait guère étonnant, dit une voix sévère.

Freyelda fit son entrée dans la salle de réception. Elle vint se planter devant Kalten et croisa les bras, mécontente. Mais elle ne put garder son air réprobateur bien longtemps et retrouva vite son doux sourire habituel.

Kalten, mon ami. Quel plaisir de te revoir ! Que nous vaut l'honneur de ta visite ? Et la Bretagne ? Tu n'as pas trop dévasté fermes et fermières j'espère ?

Kalten cessa immédiatement de grommeller dès qu'il sentit une autre présence dans la pièce... Se retournant il découvrit un homme, et jaugea par réflexe la force du nouveau venu... L'homme s'annonça comme le page du Baron de Maubec. Sa tenue confirmait ses prétentions... Avisant le linge, Kalten haussa un sourcil.

Ôter mes vêtements ?

Peu habitué qu'un homme se propose de le déshabiller, Kalten retint néanmoins une réplique quant à son orientation sexuelle pour plutôt expliquer sa surprise d'une autre façon au page...

Pas de nouveaux vêtements dont j'aurai besoin, mais d'un armurier ou un ecuyer... C'est l'acier qui est trempé, pas moi. Ne vous fiez pas à mes cheveux dégoulinants.

Pour appuyer ses propos Kalten frappa du poing son armure au niveau de son plastron, derrière lequel se dissimulait une cotte de maille, visible aux arciculations, puis un gambison pour le rembourrage.
Néanmois, Kalten s'empara du linge que lui tendait encore le page pour ses cheveux. C'est alors que Frey fit son entrée, et Kalten se débarassa du linge pour saluer son amie, sans paraître nullement touché par sa colère apparente, lui opposant un franc sourire.

Content de te revoir aussi ma grande.
Ai-je besoin d'un motif pour te rendre visite si ce n'est pour simplement te voir, toi et ta petite famille, prendre des nouvelles ou salir tes tapis ?
Petite famille qui s'est agrandie d'ailleur récemment avec l'arrivée d'un nouveau né, une petite fille non ?
Mes félécitations ma grande.

Tout en parlant, Kalten ôta ses gantelets et fit une pause le temps de rassembler ses sentiments sur la guerre en Bretagne.

Ma foi... La Bretagne... Leurs femmes risquent d'être occupées pendant les 9 mois à venir, du moins celles qui ont été épargnées à l'issu de l'outrage. Et peu ont été épargnées, mais qu'on ne vienne pas nous le reprocher. Qu'avons nous fait sinon respecter leurs volontés ? La mort plutôt que la souillure... Elles ont eu le courage d'aller jusqu'au bout de leurs convictions, elles... Evidement, dans notre générosité, nous les avons même aidés... Après on vient dire que nous sommes cruels, au contraire !

Pour Kalten, ces évènements étaient fort banals. Mais en Bretagne ils prirent pour lui un tour comique même, s'amusant à tourner en dérision le fameux adage breton. Il faut dire qu'il s'y prête bien.
Se rappellant soudainement à qui il parlait, Kalten côtura aussitôt le sujet et en entama un autre.

Enfin... C'était la guerre...
Et toi, comment vas-tu ?

A écouter Kalter lui narrer ses "exploits", Freyelda perdit quelque peu son sourire. Il y a bien des points sur lesquels elle et le seigneur de Boissieu étaient en désacord, celui des offenses faites aux femmes étaient l'un des principaux.

Un jour, tout ceci finira par te rattraper. Aristote y vieillera, sois-en-certain.

Elle soupira.

Enfin, cette abominable guerre est terminée et tous nos amis viennois sont de retour, sains et saufs. C'est le plus important, n'est-ce pas. *sourire*

Vois-tu, je suis d'autant plus contente de ta visite que nous avons bien failli ne jamais nous revoir mon cher Kaltpiten. Je ne sais si tu en as eu vent mais la naissance d'Aliénor a été bien difficile. J'ai bien failli y rester et notre fille avec. Le spectacle n'était guère réjouissant et je pense qu'il devait largement valoir quelques unes des tes sanglantes batailles.

Le simple souvenir de tous ces évènements la firent frissonner.

Aristote et son enseignement avait toujours été un sujet de discorde, amicale, entre Freyelda et Kalten. S'improvisant théologiste, Kalten prétendait souvent, au grand dam de son amie, accomplir la volontée de Totote, petit nom qu'il donne lui même à Aristote. Il avait bien tenté de pervertir son amie, à une époque, mais elle "balaya" tout ses arguments. Courageux, mais pas téméraire, Kalten se contenta d'aborder un léger sourire pour signifier à son amie qu'il ne comptait pas rentrer dans le débat quant au salut de son âme mais qu'il n'en pensait pas moins. Il avait assez combattu en Bretagne comme ça. Et Dieu sait de quoi était capable une jeune mère... Entendant les propos de son amie, Kalten hocha légèrement la tête, d'un air grave.

Oui j'en ai entendu parler... Je ne savais pas que la délivrance pouvait être si... Complexe.

Kalten regarda Freyelda dans les yeux, légèrement gêné

Je n'ai guère bénéficié d'une quelconque éducation en la matière, à part la conception de l'enfant... J'ai été surpris d'apprendre par mes compagnons d'armes Viennois que tu allais mal, et d'autant plus inquiet. On craint toujours d'avantage ce qu'on ne connait pas.

Kalten aborda un léger sourire et donna une acolade mal assurée à Freyelda. Il en est des personnes qui méritent de mourir, dont Kalten fait parti... Mais du point de vu de Kalten, si la mort se mérite ( façon de penser bien pratique pour un militaire ), il ne pensait pas du moins que son ombre puisse survoler son amie.
Ses pensées dépassant sa gêne et ses mauvais souvenir, le sourire de Kalten se fit complice.

Pendant que je moissonais les têtes, toi tu en faisait pousser une. Je ne pense pas que de ce point de vue nos batailles se ressemblent.
A part, peu être, la fierté quand on rengaine son épée rougie par le sang d'avoir su faire son devoir ?


Comment se porte le fruit de ta victoire ?

Sur ces derniers mots, Kalten lui dédia un clin d'oeil.

Aliénor se porte comme un charme, Dieu merci. Elle ne semble pas avoir souffert de sa difficile venue au monde. Peut-être que le plus dur pour elle ce furent les trois jours où j'étais plongée dans le coma entre... la v... enfin bref, où je n'étais au mieux de ma forme, dit la baronne en tentant de chasser d'un geste de la main ses mauvais souvenirs. Enfin, tout est rentré dans l'ordre et c'est tout ce qui compte. D'ailleurs, tu ne devrais pas tarder à juger par toi même. J'ai demandé à Margaux de nous l'amener dès qu'elle sera réveillée.

En effet, quelques minutes plus tard, Margaux entra doucement dans la salle de réception et vint déposer la fillette dans les bras de sa mère. Ceci fait, elle repartit aussi tranquillement qu'elle était venue non sans avoir adressé avant de partir un grand sourire au Kaltpiten.

Kalten, j'ai l'immense plaisir de te présenter Aliénor d'Avencourt, la première née du baron et de la baronne de Maubec annonça Freyelda avec un air faussement solennel et un sourire amusé.

Kalten écouta son amie parler de l'épreuve qu'elle avait subit... Il hocha imperceptiblement de la tête quand elle sembla balayer ces mauvais souvenir. Il se passerait bien des détails.

Je t'avouerai que je ne sais guère m'y prendre avec les chia... les nouveau-nés je voulais dire... Je ne pense pas que mes bras furent créés pour tenir un enfant.

Kalten parlait plus lentement qu'à l'accoutumée, choisissant soigneusement ses mots... Il devait prendre garde à ne pas laisser quelques termes peu élogieux sur les enfants franchir ses lèvres... La mère n'appréciererait sans doute pas... Fut-elle une amie.
Une habitude est dure à perdre, en l'occurence celle là il ne la perdera sans doute jamais. Mais rien ne l'empêchait de se contrôler quelque instants.
Lorsque Margaux fit son entrée, Kalten détacha son regard de son amie pour la porter sur la soubrette...Imperceptiblement, comme à son habitude, le regard de Kalten balaya rapidement la silhouette de la jeune femme de façon peu convenable.
Kalten ne vit alors Aliénor qu'une fois qu'elle fut dans les bras de sa mère, et que cette dernière la lui présenta... Il trouva néanmoins l'occasion de glisser un clin d'oeil à la jeune servante en réponse à son sourire, passant imperciptiblement son pouce sur le pommeau de son épée à son intention.
Son regard descendit lorsqu'elle passa la porte, puis Kalten reporta toute son attention sur la nouvelle Avencourt...
Chez beaucoups d'hommes, l'étranger et l'inconnu entrainent méfiance et peur... Avoir peur, Kalten ne le reconnaitra jamais ainsi, mais méfiant il l'était. C'est donc les sourcils froncés qu'il se pencha sur l'étrange boule de chair... Rose comme ces petits cochons pensa Kalten, avant de remarquer l'idiotie de sa pensée... Aliénor le fixait de ses grands yeux bleus... Et la sincérité dans son regard mettait mal à l'aise l'ours qu'était Kalten... Elle fronça les sourcils, et tendis son bras pour toucher son bouc... Dieu sait ce à quoi elle pouvait bien penser, mais c'était bien ce qu'elle voulait faire selon toutes apparemences.
Réfrénant un mouvement de recul, Kalten laissa la petite toucher son bouc... Relevant le regard vers le visage amusé de Freyelda, Kalten prit un air bourru, la mettant en garde si ses pensées venaient à franchir ses lèvres...

Pas un mot...